La formation continue des équipages des bâtiments de surface de la marine française va connaitre de profondes évolutions, a appris Mer et Marine. Un véritable changement de modèle, piloté par la Force d’action navale (FAN), qui va débuter avec les marins servant à bord des unités les plus récentes, les frégates des types FREMM et FDI, ainsi que les nouveaux bâtiments ravitailleurs de forces (BRF), avant de s’étendre à toute la flotte. Cela va notamment se traduire par la création à Brest et Toulon, au début de l’été, de deux Flottilles de perfectionnement du surfacier (FPS). L’objectif est d’adapter la formation des marins à des bâtiments de plus en plus technologiques et évolutifs, mieux gérer les compétences et déployer plus rapidement le retour d’expérience acquis en opérations.
Cette évolution majeure est liée à deux facteurs : l’émergence d’une flotte de surface dite « de pointe », qui nécessite de maitriser la conduite et la maintenance d’installations plus complexes, ainsi que la transformation du modèle de ressources humaines de la Marine nationale, avec la généralisation de la Formation Continue modulaire (FCM), la fin du modèle « tout en école » et le renforcement du compagnonnage. Ce dernier aspect est d’ailleurs l’une des raisons de la décision d’augmenter sensiblement les équipages des frégates multi-missions (FREMM) et frégates de défense et d’intervention (FDI). « On ne remet pas en cause le rôle des écoles, dont les formations de cursus restent centrales. Il s’agit de compléter avec des formations plus adaptées aux besoins opérationnels pour les phases d’adaptation à l’emploi et de formation continue des marins », explique à Mer et Marine le capitaine de frégate Julie, chargé du bureau compétences à l’état-major de la Force d’action navale, qui va piloter directement les nouvelles Flottilles de perfectionnement du surfacier.
Ces FPS, qui verront le jour le 1er juillet à Brest et Toulon, auront pour rôle le suivi de la FCM des marins des spécialités de surface et les formations spécifiques à l’emploi opérationnel sur les unités où les personnels sont affectés. Chaque flottille s’appuiera sur 60 marins experts dans les différents domaines concernés. « Le nouveau modèle des FPS repose sur trois piliers. D’abord délivrer des formations spécifiques adaptées aux bâtiments et aux équipements pour mieux coller à nos besoins opérationnels dans le cadre de l’émergence d’une flotte de surface de pointe, avec des équipements de haute technicité et des séries de bâtiments limitées qui nécessitent des compétences particulières. Le deuxième pilier, c’est un nouveau suivi individualisé des marins, spécialité par spécialité, c’est là que s’opère la bascule avec la fin du modèle du tout école vers un modèle d’acquisition des compétences au fil du temps via des passages en école mais aussi des formations à distance et un renforcement du compagnonnage, où les officiers et officiers-mariniers supérieurs sont plus impliqués dans la transmission de leur savoir. Ce suivi individuel répond aux besoins de la marine et des forces de surface de mieux générer des compétences et les piloter, aux marins demandeurs d’aller chercher des spécialités et les acquérir plus rapidement, tout en permettant l’accélération de la prise en compte du retour d’expérience opérationnel dans nos formations en les adaptant rapidement à ces retex, en doctrine comme en emploi technique. Enfin, le troisième pilier réside dans la mise à disposition d’outils pédagogiques et de simulateurs dédiés à la formation des marins ».
Ce nouveau concept, pour être efficace, doit répondre à deux impératifs, souligne le commandant Julie. D’abord, bien jongler avec l’activité des unités, en particulier les FREMM, dont seulement quatre sur huit bénéficient d’un double équipage se relayant à bord tous les quatre mois, facilitant la formation lors des périodes à terre. Alors que les bâtiments de la Marine nationale sont extrêmement sollicités par la multiplication des opérations, « il faut que l’offre de formation s’adapte aux contraintes et au rythme opérationnel des unités ». Mais aussi faire en sorte, pour les marins, que ces formations continues « ne soient pas trop lourdes en durée afin que ça ne soit pas une charge et éviter une rupture importante avec son unité. C’est pourquoi nous avons prévu des formations courtes, allant de 5 jours à 10 jours pour les plus spécifiques, avec la possibilité de découper en plusieurs phases, au sein des flottilles ou même à bord. Il faut que cela soit simple et souple. L’idée pour le marin est de se dire : j’arrive à bord de ma nouvelle unité, je fais le point sur mes acquis, je vois l’offre de formation de la flottille et je vais acquérir les compétences dont j’ai besoin ».
Ce qui emmène aussi, pour la formation continue à bord, à la volonté de la Marine nationale de renouer avec une pratique historique, le compagnonnage, qui bien qu’ayant prouvé son efficacité, s’était étiolé au cours de la dernière décennie. La faute notamment aux équipages ultra-optimisés des unités conçues au début des années 2000, telles les FREMM, dont les effectifs avaient été taillés au plus juste, en misant sur l’automatisation des systèmes. Un concept de temps de paix qui ne résiste pas aux époques plus guerrières et, au-delà des aspects opérationnels, ne laissait plus assez de temps aux cadres de former les jeunes générations. D’où la décision d’augmenter sensiblement les équipages des FREMM et des FDI, qui vont croître de 15 à 20%, soit 30 marins de plus pour les premières et 20 pour les secondes, la hausse concernant plus particulièrement les officiers-mariniers, quartiers-maitres et matelots. « Nous mettons fin au modèle de suroptimisation des équipages car on sent bien, avec les récents retours d’expériences en opérations, qu’il y a un besoin de plus de résilience sur le plan humain pour tenir les quarts et faire face à d’éventuelles avaries de combat. Il s’agit, aussi, de remettre les cadres des bâtiments, c’est-à-dire les officiers et les officiers-mariniers supérieurs, dans une phase d’accompagnement et de compagnonnage pour une meilleure transmission des compétences et une individualisation des formations ».
Ce nouveau concept devrait évidemment renforcer la spécialisation des marins selon les types de bâtiments. Cela peut-il conduire à « condamner » un certain nombre de personnels à ne servir que sur certains types de bâtiments, comme les FREMM, FDI ou FDA ? « De facto, les marins tournent déjà beaucoup, en fonction de leur spécialité, sur un ou deux types d’unités. Mais ça ne devient pas un dogme. Nous sommes centrés sur la génération de compétences, ce n’est pas basé sur un type de porteur et il n’est pas question de fermer les parcours professionnels par types d’unités. On pense aux frégates qui sont très technologiques mais pour certaines spécialités, les petits bâtiments ont un rôle important, ils génèrent par exemple beaucoup de navigateurs timoniers ».
La création des deux Flottilles de perfectionnement du surfacier, auxquelles 120 marins vont être affectés, ainsi que le renforcement des équipages des huit FREMM et de la première des cinq nouvelles FDI qui doit débuter ses essais en mer cet été, se fera sans recrutement supplémentaire. La Force d’action navale va en effet employer les personnels des Groupes de Transformation et de Renfort (GTR), créés à Brest en 2013 et à Toulon en 2015 avec l’arrivée des nouvelles FREMM afin de disposer d’un vivier de marins permettant de renforcer les équipages des frégates en opérations tout en assurant les missions de formation spécifiques à ces bâtiments. Des GTR qui disparaissent avec la mise en place du nouveau modèle. « Le bilan RH sera nul car nous allons utiliser les ressources des GTR, qui vont être ventilées entre la création des nouvelles flottilles et le renforcement du plan d’armement des frégates ».
Sachant qu’environ un tiers de l’équipage d’une FREMM est renouvelé chaque année, les nouvelles FPS seront amenées à chapeauter chaque année la formation de centaines de marins. D’abord donc pour les FREMM, les FDI et les BRF puis, entre 2025 et 2026, pour les autres unités de premier rang, à savoir les porte-hélicoptères amphibies (PHA) et les frégates de défense aérienne (FDA). Seul le Charles de Gaulle restera pour le moment en dehors du circuit. En revanche, le nouveau modèle servira dès l’année prochaine à commencer le développement des compétences nécessaires à la constitution du futur équipage du porte-avions de nouvelle génération (PA-NG), qui doit arriver à Toulon en 2035 pour une mise en service prévue en 2038. « Nous allons élargir le modèle à toutes les unités de premier rang puis, à l’horizon 2028-2030, à l’ensemble de la flotte de surface. A ce moment-là, les FPS devraient chacune compter environ 80 marins ».
Enfin, contrairement aux GTR qui n’avaient pas de tutelle fonctionnelle, les FPS seront directement pilotées par l’état-major de la Force d’action navale, où un bureau de coordination a été créé à cet effet. « L’objectif est que l’échelon central dispose d’une vision de bout en bout, depuis l’identification des compétences nécessaires jusqu’à la délivrance des formations adaptées et les mises à jour liées au retour d’expérience ».
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