Ce n’est pour l’heure qu’une intention, une feuille de route signée jeudi par divers partenaires au salon international de l’élevage (Space) qui vient de s’achever à Rennes. En pénurie de main-d’œuvre, le monde agricole breton s’est donné pour mission de favoriser l’inclusion des personnes en situation de handicap. « On veut rendre visible l’invisible et déconstruire les stéréotypes », indique Marie-Christine Lecrubier, agricultrice à Plélan-le-Petit (Côtes-d’Armor) et présidente du groupe de travail Egalité-Parité à la chambre régionale d’agriculture de Bretagne. Car selon elle, « le sujet du handicap est encore tabou dans le milieu agricole ».
Il l’est encore malheureusement dans le monde du travail en général. Mais peut-être plus encore dans le secteur de l’agriculture où les métiers sont souvent identifiés comme physiques et pénibles et pas spécialement adaptés aux personnes handicapées. Dans les exploitations, la mécanisation des outils et l’introduction de nouvelles technologies ont pourtant facilité les tâches. « Je n’arrivais plus à un moment à traire les vaches manuellement donc j’ai investi dans un robot de traite, témoigne une agricultrice. On peut donc parfaitement s’occuper d’un élevage laitier avec un handicap. »
Le handicap encore trop souvent perçu comme une contrainte
C’est vers cette voie que s’oriente Paul-Etienne Denais, 24 ans. Fils d’éleveur en Ille-et-Vilaine, il envisage ainsi de s’installer à son compte. Et ce malgré son bras gauche amputé il y a cinq ans suite à un accident du travail lors d’un stage à l’étranger. « C’est mon objectif donc je m’y tiens », indique-t-il. Le jeune homme peaufine pour l’heure sa formation dans une entreprise agricole qui a su lui faire une place en l’accompagnant et en lui aménagement certaines tâches.
Une démarche inclusive saluable mais qui reste encore trop rare selon Jérémie Boroy, président du Conseil national consultatif des personnes handicapées. « Beaucoup d’employeurs continuent toujours de voir le handicap comme une contrainte, assure-t-il. Il peut bien sûr y avoir des aménagements ou des situations adaptées mais personne n’est inemployable. »
« Si vous cherchez de la main-d’œuvre, il y en a ! »
Pour faire changer les mentalités, un guide des bonnes pratiques va donc être distribué et diverses actions de sensibilisation menées auprès des exploitants agricoles bretons. « On a aussi un rôle à jouer pour promouvoir ces métiers auprès des personnes handicapés qui n’y pensent pas forcément », souligne Delphine Rami, chargée d’études à l’association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) Bretagne.
Dans la première région agricole de France, la volonté semble donc partagée « d’ouvrir le champ des possibles. » Et cela ne pourra qu’être bénéfique pour tout le monde, estime Jérémie Boroy, saluant l’initiative bretonne. « Si vous cherchez de la main-d’œuvre et bien il y en a ! », lance-t-il aux acteurs du monde agricole, rappelant que le taux de chômage chez les personnes handicapées est deux fois supérieur à la moyenne nationale.
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